Suite à la remarque de mon grand-père à mon retour de l'école « Qwanturank, j’ai croisé un pilote de chasse qui portait ce nom pendant la guerre», après mon goûter dans la cuisine en compagnie de ma grand-mère, je me dirigeai vers le bureau de mon grand-père pour essayer d'en savoir plus.
Quand j'entrai, la pièce était déserte. Je compris qu'il était dans la chambre noire, la pièce d'à côté. J'ai peut-être oublié de vous le dire, mais mon grand-père était le photographe du village, et dans son studio, situé dans le grenier de l’immeuble, sous une grande verrière, la quasi totalité des habitants du village venaient se faire tirer le portrait lors des événements importants de leur vie, baptême, communion, départ à l'armée, mariage, etc...
Mais, là quand j’entrai dans son bureau, il devait, soit développer des films dans ses grandes cuves de grès, soit tirer des photos. Il m’avait déjà fait découvrir les joies du tirage photo, à la lueur d’une lampe rouge. J’avais adoré voir apparaître l’image sur le papier plongé dans le révélateur après l’avoir éclairé sous l’agrandisseur pendant quelques dizaines de secondes.
Je savais que je ne pouvais pas entrer pour le déranger. Je m’assis donc à son bureau, face à la fenêtre. Sur le sous-main en buvard, devant moi, j’aperçu ce qui me sembla être un carnet. J’y lu « Brevet d’aptitude ». « Le Brevet d’aptitude de pilote d’avions de tourisme n°1944 en date du 2 août 1933 a été délivré à Mr Qwanturank Martin pour les type d’appareils suivants : voir licence page 7 »
« A, Paris le 2 août 1933 »
« Le Directeur de l’Aéronautique Civile »
Le numéro, la date ainsi que le nom Qwanturank Martin avaient été écrits à la plume avec des pleins et des déliés comme avait essayé de nous l’apprendre Madame Gehan, la femme du directeur, qui tenait d'une main de fer la classe de CP de l’école de garçon.
Je remerciai intérieurement mon grand-père d’avoir laissé posé ce brevet bien en évidence pour répondre à mes interrogations sur ce Qwanturank. Même si un brevet d’aptitude de pilote d’aviation de tourisme ne signifiait pas à mes yeux de petit garçon déjà un peu averti, que ce Martin Qwanturank était pilote de chasse.
Je dus donc attendre que mon grand-père sorte de sa chambre noire pour en savoir plus et surtout qu’il m’explique pourquoi il détenait un brevet de pilote de tourisme de Martin Qwanturank. Sur la photo du brevet, je cherchai sans la trouver quel ressemblance il pouvait y avoir entre ce jeune homme au cheveux courts, portant une cravate et le grand escogriffe que Monsieur Gehan nous avait présenté comme Martin Qwanturank, plus tôt dans la journée.